11 CLEFS POUR COMPRENDRE L’AlZHEIMER ET MANGANESE
AUTEUR DE L’ARTICLE : Dr. Paulcarl, médecin généraliste.
Bonjour cher lecteur de ce blog,
C’est un sujet très peu abordé dans les publications de santé pour le public : le manganèse (= Mn), cerveau et Alzheimer fournissent pourtant l’occasion de faire de la recherche fondamentale et clinique. Dans cet article, la stratégie neuro-protectrice n’est pas abordée, mais il faut se référer à l’article précédent. D’autre part, sans faire de la publicité, le Dr Jean Paul Curtay, vient d’écrire dans les dossiers de nutrition en novembre 2017, d’excellents conseils concernant l’Alzheimer, même s’il ne parle pas du Mn. Les lecteurs intéressés trouveront toutes les références numérotées au bas de l’article.
Je remercie, Mr Joubert pour cette publication sur son blog et ses conseils.
Avant de commencer, je tiens à dire que je vais écrire désormais sous le Pseudo de « Dr Paulcarl », pour des convenances personnelles. Merci de votre compréhension.
1ère CLEF : TROPISME DANS LES NOYAUX ET CORTEX DU CERVEAU
Dans l’article précédent, nous faisions le point sur le manganèse (= Mn) et les lésions du cerveau surtout en ce qui concerne spécifiquement le manganisme et le Parkinson. C'est-à-dire le tropisme préférentiel du manganèse vers les NOYAUX du cerveau (les noyaux gris centraux ou Basal Ganglia) et certaines connections du Parkinson (la substance noire ou Locus Niger). Cette semaine, nous allons voir l’actualité de l’Alzheimer avec le manganèse. Nous parlons dans ce cas du tropisme du manganèse et de ses effets dans le CORTEX cérébral, et des zones plus en périphérie, ce qui est moins connu et moins spécifique.
Rappel pour le lecteur non averti : La maladie d’Alzheimer se distingue par l’accumulation et l’agrégation de la protéine béta-amyloïde (les fameuses plaques séniles), de la protéine Tau, ainsi que la présence d’une dégénérescence neuro-fibrillaire (dégénérescence des neurones).
2ème CLEF : HYPOTHESE DES METAUX LOURDS, DES IONS METALLIQUES ET IONS DIVALENTS
Le manganèse et Alzheimer rentrent dans le cadre l’hypothèse d’un problème de gestion des métaux lourds, des ions métalliques et des ions divalents (avec deux charges positives) dans le cerveau. Celui-ci doit gérer leurs HAUTES réactivités. C'est-à-dire que ce sont des éléments produisant des radicaux libres, et qui peuvent perturber des réactions chimiques (un ion peut prendre la place d’un autre), ou produire l’agrégation d’une protéine ou sa mauvaise conformation.
3ème CLEF : « LES COPAINS » DU MANGANESE
Le manganèse (Mn 2+), ion métallique divalent, est un des facteurs favorisant tous ces processus d’oxydations, d’agrégation et connaître l’alpha ou l’oméga de la maladie, c’est difficile. Les autres facteurs favorisants (ou « copains ») sont les suivant :
LES METAUX LOURDS : Le plomb, le mercure, l’arsenic, le cadmium, l’aluminium ont tous prouvés un effet sur la perturbation du métabolisme de la protéine Béta-amyloïde et de la protéine Tau « in vitro », bien que le lien « in vivo » ne soit pas complètement établi [1].
LES IONS METALLIQUES : Il existe aussi des ions métalliques présents à l’état normal (physiologique) mais qui en cas d’excès peuvent perturber le métabolisme de ces protéines : le cuivre (voir les travaux du Dr Isabelle Hureau) [2], le fer, et bien sûr le manganèse.
LES IONS DIVALENTS : D’autres ions divalents (= avec deux charges positives) sont perturbés dans l’Alzheimer : l’augmentation du calcium, la baisse du magnésium et du zinc.
Au final, tous ces processus dans l’Alzheimer aboutissent à une ACCUMULATION DE CALCIUM dans le neurone et à une toxicité neuronale, d’après l’avis de nombreux spécialistes.
4ème CLEF : DES TAUX ELEVES DE MANGANESE DANS L’ALZHEIMER
Un taux élevé de manganèse est suspecté comme risque d’Alzheimer et d’accélérer sa progression d’après certaines équipes (Tong Y et Coll. en 2014). Le taux de protéine Béta-amyloïde semble augmenter en cas d’exposition chronique au Mn [3].
5ème CLEF : LIAISON A LA PROTEINE BETA-AMYLOÏDE
Le manganèse possède un site SPECIFIQUE de liaison à la protéine Béta-Amyloïde comme certains de « ses copains » (le cuivre et le zinc) [4]. Son effet sur l’agrégation sur la protéine reste encore à démontrer (Etudes très récentes datant de 2016). Un véritable « casse-tête » pour les chercheurs, dans la résolution des problèmes de régulations ioniques et de liaison à la protéine.
6ème CLEF : REGULATION PAR DES TRANSPORTEURS
Dans le cortex comme dans d'autres parties du cerveau, il possède des transporteurs (importateurs et exportateurs). C’est un peu comme les « échanges commerciaux » d’un pays, le Mn est finement régulé. Les importateurs rentrent le manganèse dans la cellule et les exportateurs font l’inverse (D’ailleurs, cet ion entre en compétition avec les échanges du fer. L’augmentation de la consommation de manganèse produit une baisse de celle du fer) [5].
- L’importateur de Mn qu’il faut connaitre : le DMT1 (Divalent Metal Transporteur 1).
- L’exportateur de Mn qu’il faut connaitre : le SLC30A10 (Solute carrier family 30 member 10).
Pour plus de détails sur le DMT1, voir l’article précédent : 16 clefs pour comprendre le manganèse et les maladies du cerveau.
7ème CLEF : LE MANQUE D’EXPORTATEUR AU MANGANESE DANS LES MALADIES NEUROLOGIQUES
Nous avions parlé dans le précédent article du transporteur exportateur nommé : SLC30A10 (Solute carrier family 30 member 10). Son déficit peut aboutir à un manganisme ou un syndrome ressemblant au Parkinson (Parkinson-like), voir lien vidéo sur les patients souffrant de ce déficit en transporteur [6]: https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3664426/bin/mds0027-1317-SD2.mp4
Des études ont démontré que ce transporteur (exportateur) est diminué en expression dans le cortex frontal des patients Alzheimer (c’est à dire que l’on a mesuré le taux ARN messager dans le tissu cérébral qui est diminué) [7]. D’autres transporteurs (importateurs) peuvent être impliqués dans l’accumulation de manganèse (nous ne les citons pas).
8ème CLEF : LES LESIONS CELLULAIRES ET OXYDATIVES DANS LE CORTEX
Tout comme dans les noyaux du cerveau (noyaux gris centraux), le manganèse peut exercer son action oxydante dans le cortex et produire des lésions cellulaires. Les taux significatifs pour que le manganèse fasse son action oxydante semblent plus bas que prévus [8].
9ème CLEF : LA FONCTION MEMOIRE EST ATTEINTE
La fonction de mémoire est atteinte lors de l’exposition chronique au manganèse ainsi que les structures organiques associées à cette mémoire (c'est-à-dire le noyau caudé, le cortex frontal et pariétal). Ces structures lésées se retrouvent également dans l’Alzheimer. Chez l’animal notamment, on a retrouvé des lésions du cortex frontal lors d’exposition chronique au manganèse [9]. Enfin, il existe donc une perte neuronale et une réaction inflammatoire autour des neurones [10].
10ème CLEF : QUELQUES POINTS COMMUNS AVEC LA MALADIE DE LYME
La maladie de Lyme est la maladie transmise par les tiques. Ces dernières sont « des seringues à pattes » pleines de microbes. Un de ces microbes s’appelle « Borrelia burgdorferi » qui est la bactérie identifiée, le plus constamment dans Lyme.
Le professeur Perronne, infectiologue, nous renseigne qu’une bonne partie des malades Alzheimer sont probablement un sous-groupe de la maladie de Lyme, une sorte de « crypto-infection » qui se cache sous des apparences neurologiques. Il en donne les arguments dans son livre [11]. Il semble même que 90 % des malades Alzheimer ont dans le cerveau la bactérie de Lyme « Borrelia » !!! Nous avons bien ECRIS 90 % ; est-ce réellement un sous-groupe ? (voir page 190 de son livre sur les travaux de Judith Miklossy, chercheuse Suisse).
Dans le présent article, nous parlons de manganèse, alors pourquoi parler du Lyme ? Et bien, la bactérie Borrelia burgdorferi ne consomme pas du fer comme le font les autres bactéries classiquement. Elle consomme de façon préférentielle du manganèse [12]. Il faudrait donc trouver des études sur le tropisme du manganèse et de Borrelia dans le cerveau. Le manganèse est-il un point de rencontre entre Borrelia et Alzheimer ? Le taux physiologique de manganèse ou son excès sont-ils suffisant pour attirer la bactérie dans le cerveau afin qu’elle consomme du manganèse ou une autre substance méconnue ? Nous « marchons sur des œufs fragiles ». Il s’agit de constats tout à fait personnels, peut être un lecteur averti pourra nous répondre.
11ème CLEF : L’ASTROCYTE CONTIENT UNE ENZYME DEPENDANTE DU MANGANESE
L’astrocyte est une cellule du cerveau multifonctionnelle, elle assure des fonctions de nutrition, de protection et soutien du neurone). Elle a aussi d’autres fonctions de détoxification du liquide cérebral (liquide céphalo-rachidien). En son sein, il y a la glutamine synthétase, une enzyme qui nécessite du manganèse comme co-facteur. Cette enzyme permet à l’astrocyte d’être comme un petit « foie » à côté du neurone car elle neutralise le glutamate (excitateur du cerveau, c’est la pédale d’accélaration) et l’ammoniac (que le foie récupère aussi).
Plusieurs chercheurs rapprochent les symptômes de l’Alzheimer a un excès d’ammoniac [13], que le foie et l’astrocyte prennent en charge pour éviter les lésions de neurone grâce à cette enzyme. On se doute bien de l’importance de cette enzyme qui a besoin de manganèse. Paradoxalement un excès de manganèse inhibe indirectement cette enzyme par production de stress oxydant [14]. Et par voie de conséquence, l’ammoniac et le glutamate se retrouve à un niveau plus élevé. On voit bien ici le côté double « tranchant » des ions métalliques. Le Mn perturbe aussi les transporteurs de glutamate dans la synapse [15].
Par ailleurs, du fait de ces connexions proches, la lésion de la cellule astrocytaire est associée à l’amplification de nombreuses maladies neuro-dégénératives (Parkinson, encéphalopathie hépatique, hyperammoniémie, ischémie cérébrale) [16]. Pour les lecteurs qui veulent s’intéresser au sujet, nous parlons du « cycle glutamate-glutamine » que les nutritionniste connaissent bien. Et nous rebondissons également, auprès des adeptes du régime cétogène ou paléolithique qui sont nombreux parmi les lecteurs de ce blog et qui doivent connaître les connexions avec le glutamate et la glutamine. A vos commentaires ! Bien à vous, Dr Paulcarl.
Schéma adapté de source suivante : Tardy Marcienne. Astrocyte et homéostasie, 1991, médecine et sciences, n°8, vol 7.
REFERENCES POUR L’ELABORATION DE CE DOCUMENT
[1] Chin-Chan M et Coll. (2015) Environmental pollutants as risk factors for neurodegenerative disorders: Alzheimer and Parkinson diseases. Front. Cell. Neurosci. 9:124.
[2] Hureau, C., "Coordination of redox active metal ions to the APP and to the amyloid-β peptides involved in AD. Part 1: an overview." Coord. Chem. Rev. 2012, 256, 2164-2174. http://www.lcc-toulouse.fr/lcc/spip.php?article30
[3] Tong Y., et al. (2014). High manganese, a risk for Alzheimer’s disease: high manganese induces amyloid-beta related cognitive impairment. J. Alzheimers Dis. 42, 865–878.
[4] Wallin, C., Kulkarni, Y. S., Abelein, A., Jarvet, J., Liao, Q., Strodel, B., et al.(2016). Characterization of Mn(II) ion binding to the amyloid-beta peptide in Alzheimer’s disease. J. Trace Elem. Med. Biol. 38, 183–193.
[5] Carmona, A., Deves, G., Roudeau, S., Cloetens, P., Bohic, S., and Ortega, R.(2010). Manganese accumulates within golgi apparatus in dopaminergic cells as revealed by synchrotron X-ray fluorescence nanoimaging. ACS Chem. Neurosci. 1, 194–203
[6] Stamelou M et coll. Dystonia with brain manganese accumulation resulting from SLC30A10 mutations: a new treatable disorder. Mov Disord. 2012 Sept.
[7] Bosomworth, H. J., Adlard, P. A., Ford, D., and Valentine, R. A. (2013). Altered expression of ZnT10 in Alzheimer’s disease brain. PLOS ONE 8:e65475. doi: 10.1371/journal.pone.0065475
[8] Guilarte TR. Manganese neurotoxicity: new perspectives from behavioral, neuroimaging, and neuropathological studies in humans and non-human primates.Front Aging Neurosci. 2013 Jun 24;5:23.
[9] Guilarte TR. APLP1, Alzheimer's-like pathology and neurodegeneration in the frontal cortex of manganese-exposed non-human primates. Neurotoxicology. 2010 Sep;31(5):572-4. doi: 10.1016/j.neuro.2010.02.004.
[10] Martinez-Finley EJ, Gavin CE, Aschner M, Gunter TE. Manganese neurotoxicity and the role of reactive oxygen species. Free Radic Biol Med. 2013 Sep;62:65-75.
[11] Perronne Christian, La vérité sur la maladie de Lyme, édition Odile Jacob, 2017.
[12] Wagh, D., Pothineni, V. R., Inayathullah M., Liu, S., Kim K., Rajadas J.
Borreliacidal activity of Borrelia metal transporter A (BmtA) binding small molecules by manganese transport inhibition.
DRUG DESIGN DEVELOPMENT AND THERAPY J. 2015; 9: 805-815.
[13] Cooper A.J.L et coll. Central role of glutamate metabolism in the maintenance of nitrogen homeostasis in normal and hypermmoniemic brain. Biomolecules 2016, 6, 16;
[14]Sidoryk-Wegrzynowicz M, Aschner M. Manganese toxicity in the central nervous system: the glutamine/glutamate- γ -aminobutyric acid cycle. J Intern Med. 2013;273:466 – 77.
[15] Sidoryk-Wegrzynowicz M et coll. Mechanism of Mn – mediated dysregulation of glutamine – glutamate cycle : Focus on glutamate turnover, J Neurochem, 2013.
[16] Sidoryk-Wegrzynowicz M et Coll. Role of astrocytes in brain function and disease (2010).