CHRONIQUE DU LYME N°8
les chroniques du lyme n°8 : lA BICA « capte » le cuivre et le fer
A /Introduction
Lors de la chronique n°7, nous avions vu la structure de la protéine BicA. La protéine deux en une (un mélange fusionnel de protéine type ferritine et métallothionéine). C’est une sphère creuse chevelue !
Cette fois-ci, nous allons voir pourquoi elle est une sphère creuse et pourquoi elle a des « cheveux » … A l’intérieur de la sphère, elle va stocker du fer. Et avec ces cheveux de métallothionéines ; elle va capter du cuivre. C’est dans ces « cheveux » que le cuivre forme monovalente (c'est-à-dire une charge électrique = Cu +) va être transformé en cuivre Divalent (c’est-à-dire deux charges électriques = Cu 2+).
Tout ceci sert à quoi pour la bactérie Borrelia ? Ceci permet à la bactérie de se défendre contre le stress oxydant ambiant (intérieur du corps bactérien et de l’environnement).
On dit même d’après certaines expériences, que si Borrelia n’a pas de BicA : elle ne peut se transmettre à l’hôte, tellement elle a besoin de cette protéine pour vivre.
D’abord voyons le trajet du fer puis celui du cuivre.
Dans cet article, nous nous inspirons en partie du travail de l’équipe Italienne de Gaia Codolo et coll. et de l’article de Peng Wang, Xin Li et coll. [1, 2]
Avant d’être stocké à l’intérieur de la sphère, les ions ferreux (Fe 2+) passent par un pore et vont être transformés en ions ferriques (Fe 3+) dans des centres de transformation (les centres ferroxidase, ce sont les petits ronds bleu sur le schéma 1 et 2). Ces centres sont situés entre les sous-unités de la protéine. Puis une fois la transformation faite, ils sont stockés à l’intérieur de la sphère. Ce stockage interne évite les réactions d’oxydation du fer sur l’A.D.N et des autres structures fonctionnelles de la bactérie.
Le cuivre ne suit pas le même chemin, il est chélaté à l’extérieur de la sphère. Le cuivre va être pris en charge par des « morceaux de la protéine » riche en résidus de cystéines qui « sortent » de la sphère. Ces résidus en cystéines sont spécifiques de la famille des protéines dites « métallothionéines ». Ils permettent de chélater l’ion cuivre, ce sont les résidus nommés C.C.R [4]. Ces résidus sont présents dans toutes les protéines type « Dps » de toutes les espèces de borrelies (voir schéma 4). Notons aussi que la bicA chélate plus facilement le cuivre que le fer [5]. La fonction de chélation du cuivre est indépendante de celle du fer.
C’est le cuivre monovalent qui va être capté, il pourra aussi être transformé en divalent dans la « chevelure » de métallothionéine (non montré dans le schéma). Ce cuivre divalent est moins toxique que le monovalent.
d /Rôle de l’enveloppe dans l’immunité et l’émergence d’arthrites
Un autre rôle important de la protéine : la circonférence du cercle contient des molécules (acides aminés) qui vont réagir avec les cellules de la défense de l’hôte (avec les TLR de l’hôte) [6]. Ceci stimule le système immunitaire et produira des arthrites chez l’humain ou l’hôte. Ceci ne semble pas en rapport avec le métabolisme des ions. Mais l’apport en cuivre chez les patients atteints de la maladie de Lyme avec arthrite semble atténuer les symptômes.
1 / Remarques sur le fonctionnement de la BicA
- La BicA par sa fonction de chélation du fer ressemble aux protéines de ferritine et par sa chélation du cuivre ressemble aux protéines de types métallothionéines (Résidus C.C.R).
- Elle a d’ailleurs une plus forte affinité pour le cuivre que le fer d’après les études « in vitro ». De plus, l’accumulation de cuivre rend la bactérie plus « fragile ».
- Ces fonctions existent pour se détoxifier des ions et non pour les stocker (car le cuivre et le fer sont pro-oxydant, de plus la bactérie n’use de pas de fer pour son métabolisme).
- La BicA est essentielle pour la survie de la bactérie lors la phase dormante de la tique pour faire face au stress oxydatif et lors du repas sanguin. S’il n’y a pas de BicA, il n’y a pas de transmission à l’hôte.
2 /Que déduire de cela ?
La bactérie Borrelia comme tous les organismes doit gérer son taux de stress oxydant notamment lié aux ions métalliques.
Certains chercheurs pensent à complémenter en cuivre en association avec la prise d’antibiotique pour lutter contre Lyme et les arthrites inflammatoires. C’est une hypothèse qui ne semble pas encore pratiquée ; c’est un sujet de discussion du fait que l’apport de cuivre peut avoir de la toxicité. Cette hypothèse est évoquée dans l’article de Peng Wang et coll. (2012).
D’un autre côté, la tique emploie un chélateur du cuivre qui s’appelle la « microplusine » pour contrôler son taux de bactérie. Ce chélateur est riche en acide aminé Histidine. Il faudrait faire le tour des articles médicaux et de biochimie sur l’action de l’histidine dans les maladies infectieuse. J’avoue que je n’ai pas fait encore cette recherche…
Ici, pour BicA, Borrelia emploie une protéine chélatrice riche en cystéine pour gérer le cuivre dans son organisme.
La cystéine a également une toute autre utilité chez l’humain. On l’emploie avec N-acétyl-cystéine qui soulage les patients Lyme par son effet anti-inflammatoire et par la remontée de glutathion (voir notre article sur la N-acétyl-cystéine). En effet, il existe une réponse glutathion spécifique de l’organisme humain face à Borrelia. Ici, il n’y a pas de chélation du cuivre avec la cystéine, mais la NAC est le précurseur du glutathion, l’un de nos plus grands antioxydants de l’organisme.
En fait, l’apport transitoire de cuivre dépassera les capacités anti-oxydantes de la bactérie. C’est un sujet débattu par le corps médical car l’apport de cuivre peut être toxique.
D’un autre côté, la tique emploie un chélateur du cuivre qui s’appelle la « microplusine » pour contrôler son taux de bactérie. Ce chélateur est riche en acide aminé Histidine. Il faudrait faire le tour des articles médicaux et de biochimie sur l’action de l’histidine dans les maladies infectieuse. J’avoue que je n’ai pas fait encore cette recherche…
Cystéine, histidine, connaissance de la bicA…Ces articles sur les ions métalliques et la maladie de Lyme se veulent un point de réflexion car la documentation sur la bicA n’est pas facile à trouver. Peut être un jour en lisant ces lignes, un thérapeute, un chercheur fera le lien avec une thérapie que nous ne connaissons pas et il se dira : « Ah mais oui, BicA et cystéine ou histidine…J’ai peut être une piste de traitement ou de soulagement… ».
C’est une des vocations de ces chroniques du Lyme que d’ouvrir certaines portes comme les ions métalliques et Borrelia, domaine encore nouveau, que je découvre aussi au fur et à mesure également.
Je tiens d’ailleurs à remercier la chercheuse Xin Li, spécialiste de la bicA, de la Tufts University School of Medicine de Boston, avec qui je me suis en contact et qui a relu une partie de ce travail sur la BicA (en version anglaise). Car je ne suis pas moi-même biochimiste, ni spécialiste. Elle est d’ailleurs co-auteur dans les articles de Peng Wang que je cite en référence.
Si vous voulez télécharger les chroniques 7 et 8 en Anglais, c’est ici sur ce lien :
Sous le titre : The enigmatic BicA- The two in one protein.
Bien à vous, chers lecteurs de ce blog !
F/ REFERENCES ET NOTES COMPLEMENTAIRES
[1] Structure and immunomodulatory property relationship in NapA ofBorrelia burgdorferi. Biochimica et Biophysica Acta 1804 (2010) 2191–2197
[2] A novel iron- and copper-binding protein in the Lyme disease spirochaete. Molecular Microbiology (2012) 86(6), 1441–1451
[3] C.C.R = carboxyl-terminal cysteine-rich = terminaisons carboxyle (COOH) riche en résidus cystéine.
[4] Dans l’article de P Wang en 2012, les études retrouvent 96 % de réduction du cuivre contre 49 % pour le fer avec la bicA. C’est la forme monovalente du cuivre qui est séquestrée (Cu+), forme cuivreuse. Le Cu+ réagit avec les groupements thiols de la cystéine (R-SH).
[5] Toll like receptor : Ils interviennent au cours des mécanismes de l’immunité innée en reconnaissant des « motifs moléculaires conservés » chez de nombreux pathogènes.
Auteur : Dr Paulcarl.