CHRONIQUES DU LYME N°4 DECOUVERTE DES PEPTIDES ANTI-MICROBIENS ET MICROPLUSINE

Publié le par boisvert

Auteur de l'article : Dr Paulcarl, médecin généraliste.

 

Bonjour amis lecteurs de ce blog, pour les deux prochaines chroniques, nous allons parler de la micropulsine de la tique. Faisons connaissance avec « l’étrange » microplusine !

Cet article est inspiré en partie du travail de l’équipe Brésilienne de Sao Paulo de D. Silva[1].

a / BREVE PRESENTATION DE LA MICROPLUSINE

Si la tique était une représentante de laboratoire de compléments alimentaires, elle nous présenterait des chélateurs de métaux pour réguler les taux de bactéries. Elle en fabrique un dans son organisme : la microplusine, c’est un peptide anti-microbien chélateur du cuivre (c'est-à-dire « fixe » le cuivre dans sa structure). Les peptides anti-microbiens (P.A.Ms) sont des molécules de défense contre les bactéries et champignons.

Deux choses curieuses à propos de ce chélateur :

1 - La microplusine ne semble pas active contre les bactéries à coloration gram négative. Les borrélies de la maladie de Lyme sont gram négative, donc la microplusine ne serait pas active contre celles-ci, mais agirait sur d’autres co-infections ou indirectement par la chélation du cuivre. On parle de co-infections car la tique comme dit le professeur Perronne, infectiologue, sont des « seringues à pattes pleines de microbes ». Elle a sans doute développé des stratégies pour se défendre, elle aussi contre le monde bactérien.

Alors, on peut se poser la question si elle n’a pas une influence quand même via le métabolisme du cuivre mal connu chez les borrélies (directe ou indirecte). Le fait est que les borrélies sont plus fragiles à l’oxydation dans un milieu riche en cuivre et en fer (au moins « in vitro »).

2 – La microplusine possède une charge électrique négative (contrairement à beaucoup de peptides antibactériens), lui permettant de chélater le cuivre (notamment sa forme Cu 2+).

Faisons connaissance avec cette « étrange » microplusine. A l’image de la tique, ne devrions-nous pas intéresser vers une piste de complémentation en cuivre transitoire (comme le suggère l’article de Peng Wang dans les arthrites) ou bien plutôt une chélation du cuivre pour soigner ou atténuer les symptômes de la maladie de Lyme ou une autre co-infection bactérienne (pour les bactéries utilisant du cuivre ? Soulignons aussi le fait que la microplusine chélate également le fer (Fe 2+) nécessaire à la survie de beaucoup de bactéries).

Avant de présenter la structure de la microplusine de la tique dans la prochaine chronique (n°5), faisons un rappel sur les peptides antimicrobiens.

B /BREVE Présentation des peptides anti-microbiens

La microplusine fait partie de famille des peptides anti-microbiens (P.A.Ms). Les P.A.Ms sont largement répandus dans la nature et représentent des composés essentiels pour une première ligne de défense contre les infections. C'est-à-dire qu’ils modulent la réponse du système immunitaire inné en activant les cellules concernées chez les vertébrés et invertébrés [2]. Ainsi, Ils agissent directement sur les micro-organismes (les bactéries, les champignons et les protozoaires). Remarquons, que les invertébrés n’ont qu’une défense innée, ce qui met en relief leurs potentiels [3, 4].

C / Structures et propriétés des peptides anti-microbiens

1 - Peptides cationiques et peptides anioniques

Les P.A.Ms sont souvent de courtes molécules de 12 à 100 acides aminés chargés positivement (dit : cationiques). De façon intéressante, la microplusine est curieusement un peptide chargé négativement (dit : anionique). Les P.A.Ms peuvent être de différentes formes (linéaire, hélices, avoir un réseau de cystéines). Ils sont aussi classés selon leurs richesses en résidus spécifiques comme la proline, la glycine, le tryptophane et l’histidine (ce sont des acides aminés).

2 - Pourquoi les P.A.Ms sont-ils chargés positivement ?

En terme simple, c’est le principe de l’aimant puis une fois collé, le peptide permet de faire un trou dans la cellule.

En terme plus technique, la charge positive des P.A.Ms permet l’interaction avec les charges négatives des enveloppes cellulaires des micro-organismes. Cette interaction permet de faire un trou dans la cellule bactérienne et de la faire mourir [5].

Les P.A.Ms cationiques sont plus connus et étudiés que les P.A.Ms anioniques comme la microplusine. Ces P.A.Ms anioniques du fait de leur charge électrique différente ont d’autres modes d’actions pour lutter contre les bactéries. Les P.A.Ms anioniques agissent par l’intermédiaire d’un récepteur.

3 - Actions des P.A.Ms contre les bactéries

Selon la spécificité des P.A.Ms, ils peuvent agir contre la membrane cellulaire et le métabolisme des bactéries. Au point de vue du métabolisme : un blocage (inhibition) des enzymes et de la production de molécules (au niveau de l’A.D.N ou de l’A.R.N) est possible. Les P.A.Ms peuvent être chélateurs pour les ions métalliques comme le fer, le manganèse ou le cuivre.

D / BREVE CONCLUSION SUR L’USAGE DE LA MICROPLUSINE ET DES PEPTIDES

En ce qui nous concerne, la tique utilise la « micropulsine » pour chélater le fer et le cuivre afin de réguler son taux de bactéries. La chélation des ions métalliques pour lutter contre les bactéries n’est pas une découverte. Des équipes de recherches travaillent depuis longtemps sur ce genre de thème [6].

Les biologistes connaissent l’exemple de la calprotectine des polynucléaires chez l’humain qui est capable de chélater le manganèse et le zinc pour lutter contre les bactéries (ex : abcès à staphylocoques), c’est un des principes de dit de l’immunité nutritionnelle (en fait , on empêche les bactérie de « bouffer », d’avoir accès à leur nourriture.

Concernant, la maladie de Lyme, la question reste ouverte sur une possible supplémentation du cuivre (la question est en discussion chez les spécialistes) pour celle-ci et une chélation pour le manganèse.

Pour les chercheurs Brésiliens, la microplusine (ou molécules similaires) en tant qu’agent thérapeutique de chélation est une piste thérapeutique contre les bactéries et champignons (pour ceux utilisant du cuivre pour leurs enzymes).

La bactérie Borrelia est fragilisée dans un milieu riche en fer et cuivre, aurions-nous intérêt au contraire à prendre du cuivre ne serait-ce que transitoirement pour lutter contre elle spécifiquement ? Car beaucoup d’organismes utilisent du cuivre pour lutter contre l’infection (au contraire de la chélation). Les chercheurs ont retrouvé des hauts taux de cuivre dans le sang chez les patients « Lyme » et un apport diététique de cuivre pourrait améliorer l’efficacité de l’antibiothérapie dans les arthrites infectieuses de ces derniers [7]. Bien sûr, il faudra tenir compte du taux de cuivre chez le patient, et ne pas produire un état oxydatif important.

Pour terminer, ceci nous invite à étudier l’ion cuivre, son métabolisme et ses effets dans des tas de maladies et peut être de trouver des applications dans le lyme, pourquoi pas ?

REFERENCES ET NOTES COMPLEMENTAIRES

[1] Fernanda D. Silva. Structure and Mode of Action of Microplusin, a Copper II-chelating Antimicrobial Peptide from the Cattle Tick Rhipicephalus (Boophilus) microplus. The Journal of biological chemistry, vol. 284, N° 50, December 11, 2009

[2] Ils modulent la réponse immunitaire : par augmentation de la phagocytose, du recrutement des cellules immunitaires au niveau des sites infectieux, par induction des cytokines et la neutralisation des effets septiques des lipopolysaccharides.

[3] C'est-à-dire qu’ils n’ont pas de défense adaptative comme les vertébrés (réponse lymphocytaire spécifique).

[4] Chez l’humain, les P.A.Ms peuvent être la lactoferrine et de la calprotectine (chélatent le fer et autres ions).

[5] Leurs propriétés hydrophobiques permettent aux P.A.Ms de s’insérer dans les membranes et rompre l’intégrité physique de la cellule de la bactérie par perméabilisation, dépolarisation et perte du contenu cellulaire et donc par conséquent provoquant la mort de la bactérie (lyse).

[6] Dial et coll. Antibiotic properties of Bovine Lactoferrin against Helicobacter pylori. Digestive Disease § Science 43 (12).

[7] Peng Wang et coll. A novel iron- and copper-binding protein in the Lyme disease spirochaete. Molecular Microbiology (2012).


 


 


 


 


 

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F
Essayez le zapper. Après une piqûre de tique en Mai dernier avec début d'érythème migrant un mois après. Le zapper a résolu mon problème + cataplasme d'argile et huile de nigelle sur la plaie.<br /> Bien cordialement
Répondre
B
Zapper ???
G
Intéressant... Mais comme le cuivre fait antenne (comme tout métal conducteur d'ailleurs), est ce que ça veut dire que je suis mal barrée en tant qu'aussi Electrosensible ?
Répondre
B
Même si ce n'est pas moi qui ai écrit ce texte je me permets de répondre que nous sommes tous à des degrés divers des électrosensibles. En conséquence nous sommes tous concernés par ces interactions des métaux.